"Vous commenterez le poème de Paul Eluard à partir du parcours de lecture suivant :
a) Expliquez ce qui donne au poème un caractère intime et familier
b) Comment le poète exprime-t-il sa souffrance ?"
Problématique (d'après ce que la majorité d'entre vous a trouvé) : Comment le poète transmet-il ses émotions à travers ce poème ?
Voici une proposition de plan :
I- Un poème intime et familier
A) Une vie commune pleine d'intimité
- un poème très personnel : tutoiement + évocation du prénom de la femme + titre du poème + "dix-sept années" v. 4
- jeu sur les pronoms personnels (vie commune) :
"notre" qui commence le poème et qui se répète (= anaphore) au début de la 2ème strophe
"nous" v. 7 / "tu" v. 1 et 7 / "moi" v. 4 et 5
- champ lexical du secret (intimité) : "ensevelie" v. 1 / "refermé" v. 3 / "en moi" v. 4 et 5 / "sous la terre" v. 13 / "masque" v. 13 et 14 / "silence" v. 15
B) La mémoire d'un passé vivant
- champ lexical du commencement (un passé plein de promesses) :
"aurore" x2 v. 2 et 4 (= anaphore) / "matin" v. 2, "mai" v. 2
- champ lexical de la sérénité : "beau matin" v.2 / "claires" v.4 / "contente" v. 6 / "aimions" v. 6 / "équilibre" v. 8
- la femme comme une divinité capable d'insuffler la vie :
le nom "vie" répété 3 X en plus du verbe "vivre" v. 1, 6 et 7
ce nom "vie" est à chaque fois associé à la femme
toute puissance : "tu l'as faite" v. 1 / "donner la vie" v. 7
allitération en [m] dans la 2ème § = battement de coeur de la femme ?
C) Une intimité universelle, dévoilée, à tous vents
- des alexandrins = vers très classiques, comme une ode (// Ronsard)
- comparaison : "entre en moi comme dans un moulin" v. 5 = le poète expose son intimité à tous vents
- articles indéfinis : "un beau matin" v. 2 / "une ville" v. 2 = universalité, ça peut arriver à tout un chacun
D) Une mort familière
- la mort omniprésente : répétition du mot , notamment dans le 2ème quintil ; obsession du "masque" mortuaire v. 13 et 14
- la mort personnifiée : "la mort entre" v. 5 / "la mort vient la mort va" v. 9 / "la mort [...] boit et mange" => une mort banalisée
- la mort prend la place de Nush : elle est le sujet des verbes ("la mort entre ... a rompu... vient ... va ... boit ... mange") ; elle est "visible" alors que Nush est "invisible" (v. 111)
II- L'expression de la souffrance
A) Une rupture brutale
- les alexandrins 1 et 3 : 1ers hémistiches sur la vie et 2èmes hémistiches sur la mort
- "son poing" // un coup de poing
- la conjonction de coordination "mais" = rupture dans le poème, en plein milieu (7 vers avant, 7 vers après)
- le rythme saccadé des vers 9 et 10
- le verbe "a rompu" au passé composé, temps de l'achevé
- des oppositions fortes : du mois de "mai" v. 2 à la "neige" au v. 13 (du printemps à l'hiver) / du "matin" v. 2 à "la nuit" v. 14 / un "ville" v. 2 à un "moulin" v. 5 / de "beau" v. 2 à "aveugle" v. 14
B) L'expression lyrique de la souffrance
- l'expression du "moi" avec les pronoms personnels et déterminants possessifs : gradation dans le poème, avec présence du poète plus marquée à la fin
- les marques visibles de la souffrance : les "larmes" v. 14 ; le "masque" v. 14 et le "corps épuisé" v. 12 ; une mort vampire "boit et mange à mes dépens" v. 10, "plus dure que la soif et la faim" v. 12 = besoin physique vital.
- souffrance mentale : oxymore "mort vécue" v. 9 ; "rompu l'équilibre" v. 8 = comme un déséquilibre psychique
C) La dissolution du passé ("mon passé se dissout" v. 15)
- les temps du passé ("disais" v. 6 / "aimions" v. 7) font place au présent ("vient, va, boit, mange ..." v. 9 et 10)
- du "nous" au début du poème au "je" solitaire à la fin
- du tutoiement de la vivante ("disais-tu si contente de vivre" v. 6) à l'adresse à la 3ème personne (Nush) de la "morte" v. 11
- perte des sensations (aveugle / toujours plus claire) / soif et faim / silence (surdité)
- la terre, symbole de la frontière infranchissable : le nom "terre" répété 3 x (v. 3 et 13) : elle "enseveli[t]" v. 1, "a refermé son poing" v. 3, et marque la frontière entre le poète et la femme ("sur la terre et sous la terre" v. 13)
- les 17 années deviennent "toujours plus claires" v. 4 (jusqu'à l'effacement ?
D) L'échec de la poésie ?
- des rimes constituées de sons communs au début du poème : [i], [è] et [in], puis dissolution des rimes à la fin, seulement présence du [r] dur.
- l'indicible douleur : "je fais place au silence" qui clôt le poème v. 15
- le seul signe de ponctuation : un point final, à la toute fin
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