mardi 2 avril 2013

Huis-Clos, synthèse


Synthèse sur Huis-Clos

1- les thèmes de la pièce
  • La vérité, le mensonge, la mauvaise foi : la lumière symbolise la vérité, les personnages s'approchent ou s'éloignent de la cheminée dans la mise en scène de la Compagnie Instant. Thèmes associés : l'être, le paraître.
    •   Ex : Garcin et Estelle mentent sur les raisons qui les ont amenés en Enfer (scène des faux aveux)
  •   Les autres, le regard, le jugement d'autrui : "tous ces regards qui me mangent" (Garcin), "L'enfer, c'est les Autres" (Garcin). Le regard de l'Autre (d'Inès surtout) empêche Garcin de s'accepter, de s'aimer : il se voit comme Inès le voit, il est dépendant de ce regard. Estelle ne se sent exister que si un homme la regarde ou si un miroir lui renvoie son reflet.
Ex : Estelle vacille parce qu'elle n'a pas de miroir ; Garcin ne peut pas aimer Estelle sous les yeux d'Inès : "Je ne peux pas t'aimer quand elle me voit".
  • L'enfermement, la liberté : Chaque personnage est enfermé au sens propre et au sens figuré : même lorsque la porte s'ouvre, ils ne peuvent sortir. Garcin est prisonnier du regard d'Inès, Inès est prisonnière de son désir pour Estelle, Estelle est prisonnière de son désir de Garcin.
Ex : Lorsque la porte s'ouvre, Garcin dit : "C'est à cause d'elle que je suis resté" ; Inès demande à ce qu'on ferme la porte ; c'est Garcin qui ferme la porte, alors qu'il avait tambouriné pour qu'on l'ouvre.

  • La vie, les actes : "Tu es la somme de ta vie" (Inès). C'est l'existentialisme sartrien : on n'est que la somme de ses actes. Une fois la vie achevée, notre destin est figé à jamais, on ne peut pas revenir dessus.
Ex : Garcin n'est que lâche, puisque le seul et ultime acte commis durant sa vie est un acte de lâcheté. Ce qu'il voulait être ou prétendait être (pacifiste) ne compte pas : seuls comptent les actes réellement faits.
 
2- le caractère de chaque personnage

Estelle
Inès
Garcin
Aucune intériorité (ne se sent pas de l'intérieur p.44)
Sa conscience est extérieure à elle-même : c'est un miroir.
Narcissique : aime son propre reflet.
Vit exclusivement du regard des hommes : elle est une sorte d'incarnation ou d'allégorie du désir.
Egalement dépendante des conventions sociales, de sa position : épouse un vieil homme riche.
Précieuse : utilise des euphémismes pour atténuer la réalité de l'enfer. Elle appelle les morts des "absents".
Snob : elle méprise Inès qui n'est qu'une employée des Postes, se vante des ses relations chez les Dubois-Seymour (p.35)
Superficielle : se préoccupe de la couleur des canapés en arrivant en enfer, pense à son maquillage.
Nie la réalité : elle n'accepte pas d'être morte, s'en étonne encore dans le dénouement : "Morte ?"


Lucide : elle comprend la première que "le bourreau, c'est chacun de nous pour les deux autres" p.42
Seul personnage à ne pas dépendre du regard d'autrui : assume ce qu'elle a été.
Franche : elle ne cache pas la vérité de son homosexualité ni de sa méchanceté
Méchante donc : elle le répète 2 fois p.57 et "j'ai besoin de la souffrance des autres pour exister. Une torche[...]. Quand je suis toute seule, je m'éteins" p.57
Cruelle : nargue Garcin car elle sait qu'elle le tient, elle lui martelle sa lâcheté p.91
Dominatrice : elle utilise beaucoup d'impératifs et contraint les deux autres à parler
Manipulatrice : a réussi à se glisser dans Florence pour que celle-ci ne voit plus son mari que par ses yeux (p.56) => elle l'a dégoûté de lui. Elle l'a ensuite convaincue de sa culpabilité sur le suicide de son mari.
Assez caricaturale (mais moins qu'Estelle) -> presque un "caractère-type" du sadisme.
Débute et termine la pièce (il a le dernier mot)
Personnage sans doute le plus intéressant : c'est celui qui a le plus de réalisme, d'épaisseur.
Il n'est pas un caractère-type, il évolue au cours de la pièce :
Au début, naïf et arrogant (représentation naïve de l'enfer ; affirmation qu'il "regarde la vérité en face")
Puis devient lucide (prise de conscience que "l'enfer, c'est les Autres" p.93).
Se croit et s'affirme pacifiste (a dirigé un journal pacifiste)
En réalité, il se montre violent (cherche 2 fois à frapper Inès)
Se montre galant vis-à-vis d'Estelle, mais on découvre qu'il a maltraité psychologiquement sa femme
Se voudrait un héros mais s'est montré lâche.
A besoin de la reconnaissance d'Inès : ne supporte pas sa propre lâcheté.
Donc, un personnage plein de contradictions, réaliste.

3- le rôle des objets

La brosse à dents : la dignité, la vie

Le miroir : la conscience d'Estelle ; notre représentation du regard d'autrui sur nous ; la totale dépendance à l'autre.

La lumière : symbolise la vérité, la lucidité, la clairevoyance : "il fera grand jour dans mes yeux. Et dans ma tête" p.20

La sonnette : le lien avec l'extérieur... donc l'absence de lien puisqu'elle ne fonctionne pas ; l'espoir... donc l'absence d'espoir ; l'absurdité, l'inutilité.

Le coupe-papier : Il est détourné de sa fonction initiale qui était de couper du papier : Estelle l'utilise pour tuer Inès. Mais évidemment, Inès étant morte, le coupe-papier ne sert à rien. Il ne coupe pas : "c'est la vie sans coupure" (Garcin, p.17) -> il symbolise alors l'éternité, l'absence de temporalité. Symbolise aussi l'impossibilité d'agir, de changer quoi que ce soit à sa vie passé => l'impuissance.

Le bronze de barbedienne : le mauvais goût. Le destin : Garcin avait dit qu'il le regarderait et il le regarde. C'est un objet figé à jamais, comme les vies d'Estelle, Garcin et Inès => il représente l'existentialisme, la somme des actes sur lequels on ne peut pas revenir.


4- La composition de la pièce


Une pièce en 5 scènes :

Sc 1 : Garcin, le Garçon : p.13 à 21

Sc 2 : Garcin : p.22

Sc 3 : Garcin, Inès, (le Garçon) : p.22 à 27

Sc 4 : Garcin, Inès, Estelle, le Garçon : p.27 à 29

Sc 5 : Garcin, Inès, Estelle : p.30 à 95

-p.30 à 43 : présentation, pourquoi ensemble, faux aveux, "le bourreau, c'est chacun de nous pour les deux autres" => pacte de silence p.43

-p.44 à 49 : Inès tente de séduire Estelle, scène du miroir vivant => dispute p.50

-p.52 à 62 : les vrais aveux : Garcin, Inès puis Estelle.

-p.63 à 67 : pacte de non-agression entre Inès et Garcin

-p.67 à 71 : Estelle est laissée à Inès (à cause du pacte), elle contemple une dernière fois la vie, Inès cherche à la séduire => Estelle lui crache au visage p.72

-p.73 à 84 : rapprochement Garcin / Estelle, devant Inès => dispute p.85-86

-p.86 : ouverture de la porte

-p.87 : Garcin tente vainement de convaincre Inès, Estelle tente de le consoler, veut supprimer Inès => rire final, ensemble pour toujours

5- Huis-Clos, une tragédie ?


Huis-Clos = une tragédie
Huis-Clos ╪ une tragédie
- malheur et douleur des personnages
- présence d'un destin : dans le passé des personnages (vie figée à jamais) ; impuissance à changer le cours des choses
- conflits (Inès/Garcin, Garcin/Estelle, Estelle/inès)
- situation insoluble : cercle infernal : chaque personnage dépend d'un autre qui ne peut lui apporter ce qu'il demande.
- culpabilité d'un des personnages (Garcin)
- punition des personnages fautifs et immoraux
- absence d'espoir
- origine de la pièce dans le mythe chrétien de l'enfer (mais mythe détourné, voire ridiculisé)
  
- pas de transcendance contre laquelle se batteraient les personnages : c'est seulement contre eux-mêmes (ou leurs pairs) qu'ils se battent.
- absence d'action
- le destin n'est pas dans le futur des personnages : ils n'ont pas à lutter pour sauver leur avenir ; ils appartient au passé, il est donc absolument inattaquable.
- pas de dilemme honneur / amour ou raison / passion, pas de valeurs nobles à défendre
- anti-héros, personnages banals et pourvus de défauts




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