lundi 11 mars 2013

Huis-Clos, LA2, les faux aveux

LA2 Huis-Clos : « Le bourreau, c'est chacun de nous » ou la comédie des faux aveux

de « Garcin : Allons, pourquoi sommes-nous ensemble ? » p.38 à « Inès : Le bourreau, c'est chacun de nous pour les deux autres » p.42
Les personnages cherchent à comprendre pourquoi on les a mis ensemble. C'est Inès qui comprend que c'est lié à ce qu'ils ont « fait », et elle pose des questions.

I. Le portrait d'une sainte et d'un héros
A. Une scène de procès
  • Inès = le procureur qui veut établir la vérité + pose questions : « pourquoi », « qu'avez-vous », « Pour qui », ne tourne pas autour du pot, pose une question directe sur les actions d'Estelle : « qu'avez-vous fait ? » = comme une accusation. Porte sur l'acte (« fait »), idem Garcin (« vivre selon ses principes »)
  • + CL procès, faute, jugement : « faute » X nbses fois, « reprocher », « payer », « bourreau »
  • Estelle et Garcin = les accusés, répondent aux questions + nient les faits + cherchent à se disculper (question oratoire pour se disculper : ). Prétendent ne pas connaître les raisons de leur condamnation
  • Puis Estelle conte-attaque : « erreur » + mépris pour « subalternes », « employés sans instruction » : répétition de « erreur » (3x) + « se tromper » + « faute » et recommande cette hypothèse d'erreur aux autres, ce qui les enfermerait dans dans un déni commun (on est plus forts à plusieurs).

B. Portrait de la sainte et du héros
  • Estelle raconte son histoire : registre pathétique + dévouement => se donne le beau rôle (ce qu'Inès qualifiera de « petite sainte »)
  • Mais elle se sent en faute : « je n'ai rien à cacher » l.37 + « qu'auriez-vous fait à ma place ? » l.41 + « est-ce qu'il ne vaut pas mieux croire que nous sommes là par erreur ? »
  • Quant à Garcin : registre épique + courage => se donne le beau rôle aussi (ce qu'Inès qualifiera de « héros »)
Garcin = faux dupe (juge) d'Estelle tout comme Estelle fausse dupe (juge) de Garcin : ils agissent exactement de la même manière : disculpent l'autre pour se disculper par la même occasion. D'ailleurs, ils se reconnaissent et sentent qu'ils peuvent se fier l'un à l'autre. C'est à Garcin et non pas à Inès qu'Estelle demande de nier la faute (« A Garcin » l.50), idem, c'est à Estelle et non à Inès que Garcin de mande de nier sa faute (« et vous » l.53): ils sont lâches (n'assument pas les conséquences de leurs actes)
  • E :« croyez-vous que ce soit une faute ? » → G : « certainement non »
  • G : « où est la faute ? » → E : « Il n'y a pas de faute »
Mais les failles du discours d'Estelle : « je n'ai rien à cacher » qui est une antiphrase.
Et celles du discours de Garcin : la répétition de « Où est la faute ? » + il fait mine de frapper Inès alors qu'il se prétend pacifiste !

C. Un juge qui n'est pas dupe
Inès sait qu'il s'agit d'une comédie : « comédie » + « ironiquement » + « ne souriez pas » + « je vois » + « c'est tout ce que vous avez à nous dire ? » =>
Elle est lucide : elle parle et jette des mots sans équivoque possible : « assassins », « enfer », « damnés » + les répète avec violence (exclamations l.84). Elle avoue par la m^me occasion qu'elle, elle est un assassin : « entre nous … entre Assassins ». Elle est la plus honnête de tous.
Elle comprend qu'il y a une logique bien établie à deviner : « nous sommes en enfer », « il n'y a jamais d'erreur » « on ne damne jamais les gens pour rien ». Répétition de « jamais » => insistance sur l'impossibilité de l'erreur => réfute la seule défense d'Estelle.
+ « ma petite » = méprisant, lui montre qu'elle la domine (elle est toujours dans le rôle du procureur)
+ martèle la vérité sur le lieu et son corolaire incontournable : « damnés »
+ ironise sur les paroles d'Estelle et de Garcin : « petite sainte » et « héros sans reproche » => montre qu'elle, elle n'est pas dupe.
Inès met en balance la vie avec « plaisir », « amusait beaucoup » et la mort : « souffert », « mort », « payer », tout en s'incluant dans l'utilisation du « nous », qui inclut aussi Garcin et Estelle.


II. Procès qui révèle les règles de l'enfer
A. L'usage de la violence
Du coup, prise au piège, Estelle devient verbalement violente envers Inès : « vous voyez » x2 + « avec insolence » + « je vous défends » + « Taisez-vous »
Ils imposent le silence à Inès : « taisez-vous » l.82 + 86 + 95 => refusent la vérité, sont dans le déni
Garcin devient violent physiquement : « la main levée » + « prenez garde »
Même Inès est assez violente dans son vocabulaire, dans ses répétitions qu'on peut imaginer criées (phrases nominales + exclamations l.84 + de nouveau répétition de damné avec dénomination ironique)

Ce qui met fin à la violence : c'est la découverte d'Inès : « j'ai compris », « je sais »
C'est la violence des deux autres qui lui a fait faire le lien avec le « bourreau ».
Elle raisonne logiquement : « A, cependant B et C, en somme D => phrase de conclusion sur le bourreau »
Bourreau <= sainte et héros !
« Le bourreau, c'est chacun de nous pour les deux autres »

B. Ne pas pouvoir jouer la comédie
On en apprend plus sur les personnages qu'ils ne veulent bien le dire explicitement :
- Inès : Comparaison de l'enfer avec une société coopérative : « économie de personnel », « clients », « service », « restaurant coopératif » => C'est Inès, l'employée qui parle, évidemment. Caricature sociale. + Paroles d'Inès : crues, voire « grossières » (« bête comme chou »)
- Estelle : méprisante (méprise le personnel + ne veut pas être incluse dans le « entre nous » d'Inès, petite employée des Postes), refuse de regarder la vérité en face (gens qui s'absentent), besoin d'être rassurée, suivie (et vous, dites qqchose), hypocrite (ment sur son passé), naïve (croit ou fait semblant de croire ce sue dit garcin). + Paroles d'Inès : empruntées, précieuses (« gens qui s'absentent »), prend soin de son apparence
- Garcin : violent (// a torturé sa femme), « j'ai osé » : aurait voulu être héroïque
- Garcin et Estelle : refusent la vérité, refusent qu'Inès parle, qu'elle mette à jour la vérité.

C. Etre toujours soumis au regard et au jugement de l'autre :
CL du regard : Garcin a été fusillé parce que les autres savaient : « yeux fixés sur moi », « vous voyez » l.71, « je vois » l.73, « Inès le regarde sans peur mais avec une immense surprise » l.96, « vous allez voir » l.103 => celui qui voit = celui qui sait, qui détient la vérité. Ici, celle qui sait = Inès.
Existentialisme : j'existe par le regard de l'autre, je dépends du regard de l'autre. Si l'autre a une mauvaise image de moi, je m'écroule en tant que sujet.
Estelle et Garcin n'assument pas leur passé, leurs actes : c'est cela leur enfer.

CL de la parole : « courage de dire » l.10, « dites quelque chose » l.29, « tout ce que vous avez à nous dire » l.35, « vous allez dire » l.101, + tous ce qui a trait à « se taire » => la parole qui dit la vérité, celle qui la cache, celle qui menace, celle qui supplie, celle qui met en doute... Celle qui dit = Inès.

Or dire, c'est faire exister. Tant que Garcin et Inès se taisent, il n'y a pas de vérité, ils peuvent prétendre à l'erreur. Pour eux, il est primordial qu'Inès se taise pour sauvegarder les apparences, pour faire comme si, comme dirait Estelle : « mieux croire que nous sommes là par erreur ».
L'autre (Inès) met en danger les deux autres parce qu'elle les juge, elle sait qu'ils ont des côtés sombres.

D'où la conclusion d'Inès : pas de torture physique + seuls ensemble jusqu'au bout + bourreau => bourreau psychologique = chacun va faire souffrir les autres. Comment ? En étant ce que l'autre veut ignorer ou en ignorant ce que l'autre veut (on saura après que : Inès veut Estelle qui veut Garcin qui veut la reconnaissance d'Inès)

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